Vatican: Le lieu où même Dieu s’est retiré
- myssmylen
- 9 mai
- 3 min de lecture

même la pierre devra se souvenir de sa soif
Je suis entrée en méditation sans image nette.
Pas de décor, pas de structure visuelle fixe.
Juste un nom dans mon cœur : le Vatican.
Je me suis dit que les souvenirs diffus suffiraient à m’orienter.
Mais je ne m’attendais pas à ça.
Un vide.
Un vide si profond qu’il n’avait plus même l’écho du sacré.
Pas de nature. Pas d’âme. Pas de Dieu.
Le silence n’était pas doux, ni mystique —
il était maîtrisé. Froid. Presque clinique.
Comme si tout avait été scellé. Nettoyé.
Éteint.
Et pourtant, ce lieu est censé vibrer de foi, de foule, de vie.
Mais je ne sentais rien.
Rien.
Sauf une fontaine. Au centre. De pierre. Imposante. Figée.
Alors j’ai fait ce que je fais quand plus rien ne respire :
j’ai planté un arbre.
Un acte simple.
Pour marquer le vivant, pour déposer une mémoire dans la pierre.
Mais l’arbre ne poussait pas.
Alors j’ai continué.
Un peu plus loin, un sol particulier m’a appelée.
Une fresque géométrique, parfaite, ancienne.
Un cercle dans un carré, encadré d’étoiles.
Je me suis assise en son centre.
Et là, un faisceau de lumière est sorti de moi.
Silencieux, concentré.
Un rayon projeté avec lenteur, venu du cœur, tombant droit sur la fresque.
Un acte d’activation.
Ou peut-être… d’appel.
C’est dans ce geste que je l’ai senti.
Quelque chose m’attendait en dessous.
Alors j’ai descendu.
Dans l’invisible. Dans les couches profondes de l’esprit.
Et dans ces voûtes, là où peu descendent vraiment,
j’ai senti un souffle ancien.
Le sceau de Salomon m’a traversée.
Pas en image, mais en vibration.
Cette même énergie que celle qui parlait aux forces,
qui posait des ordres à l’invisible sans le dominer,
mais avec autorité vivante.
Et c’est là que je l’ai vu.
Un voile.
Suspendu dans l’ombre.
Triangle de tissu bleu marine, lourd et doux à la fois.
Ancien.
Vibrant.
Il me rappelait ces ceintures berbères que l’on noue pour danser,
mais celui-ci était différent.
Sacré. Scellé. Offert.
Trois breloques dorées pendaient à ses extrémités.
L’une d’elles — la plus centrale —
était faite pour tomber devant la bouche.
Pas pour parader.
Pas pour cacher.
Mais pour filtrer. Traduire. Ou peut-être… protéger.
Comme un sceau posé sur les lèvres.
Un filtre à vérité. Une voix sacrée.
J’ai senti que ce voile était un objet d’autorité intérieure.
Qu’il était un outil pour parler juste, ou pour taire le chaos quand il monte.
Je n’y ai pas touché.
Mais il m’a vue.
Et il s’est imprimé en moi.
En remontant, je suis retournée à la fontaine.
Mais l’arbre que j’avais planté avait disparu.
Effacé. Rejeté. Avalé.
Alors j’en ai planté un autre.
Plus lumineux.
Plus enraciné.
Plus décidé.
Et c’est seulement en revenant dans la matière que les révélations ont commencé.
Oui.
Il y a deux fontaines au Vatican.
Deux bassins. Deux structures parfaites, opposées.
Et moi, sans le savoir, j’avais planté deux arbres.
L’un après l’autre.
Chacun dans sa fontaine.
Puis, en fouillant plus loin, j’ai découvert que la fresque géométrique existe.
Et qu’elle est dédiée… à Athéna.
Pas un saint.
Pas un évangile.
Une déesse.
Et ce n’est pas tout.
Des statues d’Isis dorment dans les couloirs.
Des symboles rappellent Dogon, dieu de l’eau,
enfermé dans un royaume de pierre…
où l’eau ne coule plus.
Tout est là.
Les anciens dieux.
Mais figés. Dépouillés. Classés.
Et l’eau ?
Elle ne se déverse nulle part.
Elle tourne.
En boucle.
Bénie mais morte.
C’est là que j’ai compris.
Ce n’était pas un voyage pour explorer.
C’était un appel à revenir.
Mais pas en touriste spirituelle.
En rivière.
Je ne suis pas venue pour révéler un secret.
Je suis venue pour ramener l’eau vivante.
Pas l’eau sacrée des élites.
L’eau libre.
L’eau du peuple.
L’eau qui guérit.
L’eau qui circule à nouveau.
Le voile, je le porte désormais en moi.
Il me rappelle que certaines paroles doivent être justes.
Que certains silences sont sacrés.
Et que mon feu peut devenir Verbe — mais seulement quand je choisis.
J’y retournerai.
Avec deux arbres dans les paumes,
une rivière sous la peau,
et le souvenir d’un temps où même les dieux
buvaient à la même source que nous.
Parce qu’un jour, même la pierre devra se souvenir de sa soif.




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